Plusieurs signaux semblent depuis le printemps dernier composer un faisceau favorable à la cause de l’enseignement humaniste, que l’APLettres n’a jamais laissé de servir. Pour la première fois en effet depuis une quinzaine d’années, le pédagogisme adisciplinaire et l’utilitarisme mercantile de l’approche par compétences marquent un recul notable en des points névralgiques du front éducatif : le recrutement, les programmes, l’évaluation – provoquant des soupirs et de grands élancements, forcément de bon augure, du côté du Café pédagogique.
La nouvelle mouture du CAPES tout d’abord inverse le processus de dédisciplinarisation à l’œuvre depuis 2010 et que la réforme de 2022 avait couronné. Nous ne saurions être rassérénés tant que ne sera pas rompu, et non seulement desserré, le carcan de la mastérisation voulu par l’UE et l’OCDE pour arracher la formation des professeurs à l’Université et la marquer au fer de l’approche par compétences. Il n’empêche que les épreuves arrêtées, certes imparfaites, composent un concours très majoritairement disciplinaire, à l’amélioration duquel l’APLettres œuvre déjà en vue de la session 2027.
Le projet de programme de français pour le cycle 4 vise à la construction connexe et méthodiquement progressive de la maîtrise linguistique et de la culture littéraire du collégien. Certes, ce programme prolongera celui du cycle 3, maladroit et décevant, mais qu’il orientera et corrigera peut-être, et sacrifie à certains vices pédagogistes ; il est nonobstant bien plus proche de celui de 2009, que l’APLettres avait inspiré, que de celui de 2015, de funeste mémoire.
Enfin, si l’on considère, comme nous le confiait naguère à juste titre un conseiller ministériel, que le système éducatif français se pilote par les examens, on prendra la réjouissante mesure de l’abandon de l’évaluation par compétences pour l’attribution du brevet.
Entendons-nous bien, il ne s’agit pas de nous leurrer en nous payant de si peu. Nous savons que les universités sont la proie, pour leurs subsides, d’un chantage aux compétences. Nous savons qu’aucun cap, et pour cause, n’est fixé, et que les améliorations que nous encourageons vont à l’encontre de ce que préconisent les institutions internationales. Nous savons enfin que les structures et plus encore le personnel nous sont contraires. Quant à celles-là, nous voulons croire cependant que l’effarant projet d’évaluation proposé par la DGESco pour pallier les défauts inhérents à la réforme Blanquer du lycée n’est que la reconnaissance de ce qu’elle n’est pas viable et l’annonce de ce qu’il faudra y revenir – et l’on sait que les propositions de l’APLettres sont prêtes et opérationnelles ; quant à celui-ci, il se pourrait que dans les luttes d’influence qui le traversent et où par exemple le rapport de l’IGÉSR sur la classe de seconde est le pendant des mesures que nous évoquons ici, il y ait pour nos idées un avantage qu’il nous revient de pousser.
En tout état de cause, la lutte, outre que la cause y oblige, n’est jamais vaine, et notre association ne peut que se louer de n’avoir jamais transigé avec l’air du temps, de n’avoir jamais perdu les principes de vue. Aussi ne puis-je conclure cet éditorial qu’en engageant instamment mon lecteur à renouveler sa cotisation, voire à adhérer, s’il ne l’a pas fait et à faire connaître notre association et ses travaux.

